Il y a encore quelques années, devant une gastro-entérite aiguë non bactérienne, non parasitaire, on disait qu'il s'agissait d'une infection « virale » sans espoir d'identifier le virus, d'une « grippe intestinale » comme on l'entendait dans les milieux populaires. La situation a bien changé : près des trois quarts (peut-être plus pour certains) de ces gastro-entérites seraient liées à un virus récemment identifié : le norovirus. |
L'histoire du norovirus commence en 2002, lorsqu'on constate de gigantesques épidémies de gastro-entérites sur des navires de croisière -ce qui le situe d'emblée dans le champ de la médecine des voyages.
On isole alors un petit virus sphérique, de 27 à 35 nm, à ARN non enveloppé, de la famille des Caliciviridae, anciennement appelé virus Norwalk-like.
Sa contagiosité, féco-orale directe et indirecte, est extrême : l'inoculum infectant est très petit, se réduisant parfois à quelques particules virales : 10 à 100 semble-t-il. Il persiste environ 3 semaines, pendant lesquelles il est excrété dans les selles et contamine mains, air, surfaces, eaux, aliments...
Il est très stable dans l'environnement : 1 mois à 20°C, plus de 2 mois à 4°C. De plus il est :
Il ne confère qu'une immunité de courte durée (quelques semaines à quelques mois), et sa propagation est favorisée par l'existence de porteurs asymptomatiques (30% ?).
Au total, toutes les caractéristiques d'un virus « extrême » contre lequel nous de disposons de quasiment aucun moyen de lutte. Fort heureusement, son expression clinique est généralement peu grave -ce qui correspond bien à la définition intrinsèque d'un virus expansif.
Sa répartition dans le monde est mal connue, dépendant des capacités de chaque pays à l'identifier et à mener des études épidémiologiques difficiles. A priori, on considère que le virus a une répartition mondiale. Dans dix pays européens et en Amérique du Nord, ces études montrent clairement une augmentation très rapide du nombre de cas depuis 2002 et autorise la qualification de « maladie émergente ».
Les croisières sont en péril, alors que le marché spontané est en pleine expansion (+8% par an depuis 1980). Les Etats-Unis détiennent 75% de ce marché estimé à 8 millions de passagers et à plus de10 milliards de Dollars.
Les voyageurs, âgés le plus souvent, cherchent calme et sécurité.
Or ce sont plusieurs centaines de navires qui ont été contaminés au cours des deux dernières années ; et personne ne sait comment les décontaminer.
A noter que, peu après l?attaque des navires (y compris le Queen Elisabeth II), des épidémies ont éclaté dans des hôtels et « resorts » prestigieux.
L?incubation, silencieuse, est très courte : 24-48 heures.
Puis apparition brutale de nausées, vomissements (parfois violents), diarrhée sans glaires ni pus ni sang, crampes abdominales, fièvre (ne dépassant pas 39°C), céphalées, myalgies ; possibilité de déshydratation et de troubles hydro-électrolytiques, potentiellement graves chez les sujets âgés (clients habituels des croisières) et chez les nouveaux-nés et nourrissons.
Les troubles durent de 12 à 60 heures.
Coproculture et examen parasitologique des selles négatifs ; hémogramme, VS, CRP sans particularité.
PCR sur selles ou vomissements : méthode actuelle de référence.
Sérologie (augmentation des titres d'IgG), microscopie électronique : intérêt très limité.
Pas de traitement curatif spécifique.
Rééquilibration hydro-électrolytique.
Traitements usuels habituellement réclamés par les patients, type anti-vomitifs, inhibiteurs de la sécrétion intestinale (Tiorfan®), pansements gastro-duodénaux (type Smecta®), et/ou inutile « désinfection intestinale » (type Ercéfuryl®)...
Ce sont les précautions universelles, ici renforcées compte tenu de l'extrême contagiosité. Lors d'une croisière, il est difficile de choisir sa nourriture : on préfèrera les aliments très cuits. En revanche, la prévention de la transmission indirecte sera très privilégiée : lavage des mains fréquents et systématique avant tout repas, ongles courts...
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